Histoire vendéenne vécue, le Complet Bleu

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Le Complet Bleu
Histoire vécue par mon Grand-Père Félix MOREAU en 1945
En sa mémoire, Dominique GAUVRIT
 
Dans cette douceur du 5 mai 1945, le couchant embrassait l’horizon. Un soleil triomphant comme un soir D’AUSTERLITZ notre VENDEE parée de choux fleuris et marguerites des prés m’accueillait, comme elle accueillait ses milliers de rapatriés. C’était le printemps du grand retour. Dans le sentier herbeux qui montait vers la vieille ferme paternelle, mon coeur battit très fort lorsque je vis ma mère qui accourait vers moi les bras grands ouverts et des larmes pleins les yeux.
Et ses premiers mots vont peut-être vous paraître insolites « Tu as un beau complet ».
 
Bien sûr la question pourrait paraître secondaire, car, après une si longue absence tout respirait la liberté retrouvée. J’étais de ceux qui avaient eu le malheur d’avoir 20 ans en 1942, ceux qu’on appelait les STO. Nous n’avions certes pas la prétention d’avoir souffert autant que les prisonniers de guerre qui rentraient après cinq années passées derrière les barbelés, mais deux années avaient suffi, exposés sur des sites industriels dangereux pour y laisser 60000 des nôtres.
 
Dans ces villes écrasées sous les bombardements et les grands incendies, nous y avions perdu nos biens personnels, réduits à un état de délabrement vestimentaire indescriptible.
 
Mais voici qu’un jour, notre groupe de travailleurs étrangers avait, disons, étrangement bénéficié d’un lot de vêtements occasionnels, et j’avais eu la chance de me glisser dans un complet pour y reprendre l’aspect d’un homme civilisé. C’était providentiel mais déjà nous attendions un autre événement plus exaltant et surtout plus  dangereux, l’assaut des alliés, la libération le retour vers la mère patrie, l’écrasement du grand REICH. Voilà pourquoi ce soir là, je rentrais enfin à la maison dans un confortable costume bleu marine, fripé certes, mais qui après un bon lifting, devint tout à fait présentable pour me lancer à corps perdu dans les tourbillons du bal de la victoire. Une époque délirante qui comptera parmi les plus belles heures de ma vie. Le cauchemar était bien terminé, mais le monde découvrait alors les hallucinantes réalités de la barbarie NAZIE qui dépassait en horreur tout ce que nous pouvions imaginer AUSCHWITZ  BUCHENWALD  TREBLINKA. Des millions de cadavres partis en fumée la solution finale. Un doute me traversa l’esprit, un doute affreux qui se mua bientôt en certitude, n’étais-je pas revenu vers la liberté, bien fringué dans la dépouille d’un martyr. Certaines obsessions sont tenaces et mon imagination débordante s’inventait un homme jeune vraisemblablement de ma taille, marchant nu vers le supplice. Je ne pouvais plus, je ne voulais plus bénéficier de cet habit qui me collait à la peau comme une complicité. Malgré la pénurie persistante j’ai refilé mon beau costume dans l’anonymat d’une oeuvre caritative. Souvent, très souvent ma pensée s’est envolée vers l’ami inconnu avec une prière simple, la seule chose que je puis offrir en retour.
 
Tous les espoirs sont permis lorsqu’on a 23 ans et qu’on vient d’échapper à un cataclysme mondial. Une tache immense nous attendait. La FRANCE était ruinée mais nous allions la reconstruire. Retroussons nos manches ça ira mieux, disait alors un slogan que je ne suis pas prêt d’oublier.
 
FELIX MOREAU, Treize-Septiers
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